Marie Labat
Nous évoluons sur un territoire, nous élaborons des conditions matérielles, intellectuelles formant l’environnement de quelqu’un, de quelque chose. Nous ne pouvons faire sans une activité sur notre milieu pour exister. Nous avons en notre pouvoir la capacité de modifier notre environnement, à en prendre le contrôle.
Les matières, les formes présentes sur un pays, sur un paysage, propre à ses habitants me permettent d’entrer dans un travail de création. L’autre m’intéresse, ses conditions et son contexte, connaître et reconnaître l’histoire d’un individu ou d’un groupe par ses objets. Je m’approprie leur plasticité, l’espace et l’histoire des lieux pour exprimer ma lecture et faire exister un nouveau « paysage ».
J’essaie d’entraîner des associations d’objets, de matières et d’idées ouvrant sur des nouvelles images, qui mettent en évidence des possibles certitudes, celles de nos conditions liées à nos comportements, nos limites et nos frontières d’émancipation. Les détournements prennent forme dans des unions pour certaines improbables. Ils sont des moyens me permettant de produire des créations qui nous renvoient à notre société, à partir d’un territoire, l’Homme et sa réalité, aux frontières entre révélation et nouvelle mythologie, révolte, humour et poésie.
Je connais et reconnais les objets, les matériaux et les formes empruntés au travail des campagnes et à l’activité humaine en général que j’utilise dans mes créations. Les outils présents et utilisés dans mon travail suggèrent toujours l’idée d’un parallèle entre l’Homme possesseur et l’Homme objet. Les espaces ruraux sont riches de différentes matières et d’un contexte social et politique. Dans mon travail, ils sont un prétexte pour aborder les états de soumission et d’émancipationhttp://marielabat.wix.com/marielabat
Nuit étoilée
Dessin numérique, impression sur bâche, 300/460 cm
Chez Michel Poueymirou
La silhouette de Gérard Depardieu dans Jean de Florette représente l’étoile polaire. La dureté des Hommes qui a raison de Jean est prise dans une nuit étoilé. Jean est au centre de l’univers, les mains ouvertes, les bras tendus pour accueillir les plus belles richesses de la nature. Mais tourne autour de lui les lignes de barbelé, image d’un monde malveillant. Jean est le cœur de cet univers mais gravite des éléments qui l’emprisonne. L’homme est un doux rêveur, persuadé que la seule frontière entre une idée et sa réalisation est la volonté humaine et la sienne est infatigable… Rien ne lui paraît impossible. « Après avoir longuement médité et philosophé, je suis arrivé à la conclusion irréfutable que le seul bonheur possible c’est d’être un Homme de la Nature. » La nature humaine comprend-t-elle ça ?
La maison rêvée
Installation, plancher, roues, pierres, bois
Chez Christophe Cazajous
C’est un morceau de plancher formant un angle fixé sur un axe à la manière d’un tourniquet, un jeu d’enfant. Enfant nous aimons nous cacher, nous abriter dans les recoins d’une maison. Ce refuge, ce fragment de maison devient un lieu de rêverie, un espace protecteur. Le rêve éveillé développe chez l’enfant son approche du monde. Ici, « la maison rêvée » s’ouvre sur la nature. Le lieu protecteur n’est autre ici que l'environnement naturel. Le paysage à 360° devient les parois rassurantes de la cabane d'enfant. Le dépouillement de la plateforme oblige le spectateur à se reconnecter avec l'essentiel : la nature dans laquelle il s'inscrit.
L’eau vive
Installation, barbelé, 5 boîtes à musiques, dimension variable
Chez Christophe Cazajous
La mélodie est une allégorie de la liberté. Chantée par un berger, oncle d’Hortense, la jeune fille est éprise de liberté. L’eau est ici l’image de l’affranchissement « Courrez, courrez jamais vous ne l’attraperez ». La boîte à musique est un objet musical à la sonorité particulière, elle évoque l’invitation au sommeil et aux rêves de l’enfant. Les ballons sont aussi des objets récurant de l’enfance. Les plus petits lâchent des ballons qui montent dans le ciel jusqu’à s’échapper. Les regards sont émerveillés par cette disparition.
La situation de la boîte à musique posée au sol oblige le spectateur à se baisser s’il souhaite l’actionner. Il fera l’effort de se mettre dans une position inconfortable, plus petit, plus fragile et plus menacé comme un corps d’enfant. Il percevra de façon différente le bouquet en barbelé par un changement de perspective. Le barbelé est utilisé pour parquer les bêtes et parfois les hommes, les contenir dans un lieu ou un état, il évoque l’enfermement à la différence de la comptine qui est un hymne à la liberté. Les ballons de barbelé suggèrent un déplacement impossible, pourtant la mélodie donne l’espoir d’un mouvement, la course libératrice ?
Plusieurs spectateurs pourront actionner en même temps les différentes boîtes à musique, parviendront-ils à se mettre à l’unisson, à sonner ensemble, sur le même rythme, sur la même idée de liberté, de respect, de perception commune pour revoir un vol de ballon ?
Dessin moi un mouton
Bois, peinture, 70/200cm
Chez Christophe Cazajous
La forme de la boîte évoque celle de la boîte dessinée du conte de St Exupéry. Le Petit Prince demande « dessine-moi un mouton ». Il en résulte le dessin d’une boîte. Libre au Petit Prince d’imaginer le mouton à l’intérieur. Comme l’enfant du récit, le spectateur peut imaginer la présence dans la boîte. L’idée d’une boîte de transport pour bétail qui a la forme d’un corps renvoie le public à sa condition. Notre nature est-elle semblable aux animaux privés de liberté dont l’existence est géré par d’autres ?